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Les professeurs Philippe Even et Bernard Debré interdits d'exercer la médecine pendant un an

La chambre disciplinaire de l'ordre des médecins d'Ile-de-France, estime que les auteurs du « Guide des 4 000 médicaments utiles, inutiles ou dangereux » ont manqué de confraternité dans leur ouvrage.

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Publié le 18 mars 2014 à 19h07, modifié le 19 mars 2014 à 08h15

Temps de Lecture 3 min.

Les professeurs Bernard Debré et Philippe Even, le 23 octobre 2012.

Manque de confraternité, manque de déontologie. C'est ce qu'a retenu la chambre disciplinaire de l'ordre des médecins d'Ile-de-France, qui a condamné lundi 17 mars les médiatiques professeurs Philippe Even et Bernard Debré à un an d'interdiction d'exercer la médecine, dont six mois avec sursis. Une information révélée par Europe 1 mardi 18 mars. En cause : leur Guide des 4 000 médicaments utiles, inutiles ou dangereux, sorti en 2012, à la suite du scandale du Mediator, et qui s'est vendu à 200 000 exemplaires.

Bernard Debré se montre surpris, et scandalisé. « Nous sommes sanctionnés parce qu'on a dit ce qu'on pensait, c'est un délit d'opinion, cela ne tient pas une seconde. » « Nous sommes retraités, cela ne va donc rien changer, mais symboliquement, c'est inacceptable : si on exerçait encore, cela veut-il dire qu'on ne pourrait plus opérer, plus soigner ? », poursuit-il, persistant à défendre un « livre nécessaire ».

Bernard Debré, 69 ans, est retraité depuis quelques mois et n'est plus inscrit au tableau du conseil de l'Ordre. Philippe Even, 82 ans, y est toujours inscrit comme exerçant une activité à l'hôpital Necker. Un an d'interdiction d'exercer, la sanction est plutôt lourde, selon un bon connaisseur des décisions des chambres disciplinaires.

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« Cahuzac a eu trois mois, et quand des patientes se plaignaient des agissements de leur gynécologue, l'Ordre enterrait leurs lettres », commente le Pr Debré, en référence au Dr Hazout, récemment condamné à huit ans de prison. Il argue que les médicaments cités dans leur ouvrage sont pour beaucoup fort critiqués aujourd'hui, et ajoute que si, certes, ils s'en sont pris à la profession d'allergologue et à la technique de la désensibilisation, jamais ils ne se sont attaqués nommément à certains de leurs confrères.

LES DEUX PROFESSEURS ONT « MANIFESTEMENT MÉCONNU LEUR OBLIGATION DE CONFRATERNITÉ »

Les deux décisions de la chambre disciplinaire, nominatives et similaires, que Le Monde a consultées, considèrent que les deux professeurs ont « gravement mis en cause la compétence et l'honnêteté de médecins » — notamment les allergologues, qualifiés de « gourous, de charlatans ou de marchands d'illusions ». En décriant les traitements prescrits, « les auteurs suscitent chez les patients un sentiment de défiance à l'égard du médecin traitant », est-il écrit. Et la chambre de conclure qu'en agissant de la sorte, les deux professeurs ont « manifestement méconnu leur obligation de confraternité ».

En outre, s'agissant de leur critique des médicaments hypocholestérolémiants et des statines, elle estime qu'ils ont « gravement manqué à l'obligation de prudence », car le risque existait que des patients interrompent leurs traitements. De plus « par [le] caractère catégorique, voire péremptoire de leurs affirmations, les auteurs ont, au mépris de leurs obligations déontologiques, entendu donner aux ouvrages incriminés un tour spectaculaire non dépourvu de visées commerciales ».

Si le livre avait trouvé son public, il avait suscité de nombreuses critiques dans la communauté médicale. Quatre ordres des médecins départementaux avaient porté plainte auprès des instances disciplinaires (Paris, Aisne, Bouches-du-Rhône et Nord), ainsi que la Fédération française d'allergologie, ou encore plus de deux cents médecins à titre individuel, qui leur reprochaient notamment des propos diffamatoires et injurieux.

A l'ordre des médecins de Paris, on se refuse à tout commentaire : « Nous prenons acte », indique Irène Kahn-Bensaude, sa présidente, qui rappelle cependant que son instance n'avait eu d'autre choix que de saisir la chambre disciplinaire au sujet d'un ouvrage « pas très confraternel » et pas toujours en ligne avec « les données acquises de la science ».

Alain Choux, médecin parisien qui leur reprochait principalement « des contre-vérités » sur les statines et les médicaments hypocholestérolémiants, a reçu mardi matin par courrier les deux décisions d'interdiction temporaire d'exercer. Il les trouve insuffisantes. « Je vais faire appel », assure-t-il, reprochant aux auteurs, « de faire du fric sur le dos des confrères et des patients avec leurs titres de docteurs en médecine ». Il souhaite qu'ils ne puissent plus s'exprimer si facilement dans les médias. Et particulièrement le Pr Even, dont il rappelle l'implication, dans les années 1980, dans le fiasco de la ciclosporine, qui devait permettre de guérir du sida.

Selon Bernard Debré, les deux professeurs vont eux aussi faire appel, « évidemment ».

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