Épidémie de grippe A (H1N1) de 2009-2010 en France

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L'épidémie de grippe A (H1N1) de 2009 en France est une pandémie de grippe qui dure douze mois (de juillet 2009 à aout 2010), et qui provoque un peu plus de 320 morts directes. C'est la deuxième pandémies historiques causées par le sous-type H1N1 du virus de la grippe A, la première étant la grippe de 1918.

Historique[modifier | modifier le code]

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) qualifie la situation de pandémie le [1]. Le , l'Institut de veille sanitaire annonce le premier cas mortel de grippe A (H1N1) en France[2], une jeune fille touchée par la grippe A (H1N1). Des doutes subsiste sur la cause réelle du décès, car la jeune fille souffrait aussi de complications pulmonaires graves. Le , un patient de 26 ans en bonne santé meurt à Saint-Étienne[3]. En , on identifie l'agent infectieux, une souche mutante de la grippe A H1N1, également découverte en Norvège[4]. Le , deux décès sont imputés à une forme mutante de la grippe A[5].

Le 20 octobre 2009, une campagne nationale de vaccination est lancée[6] : dans les écoles à partir du 25 novembre, dans les collèges et les lycées à partir du . Le , les centres de vaccination sont ouverts le dimanche, les horaires étendus, et une centaine de médecins militaires sont mobilisés[7].

L'épidémie reflue rapidement : le , elle est annoncée officiellement stoppée en France[8].

Bilan des morts directement liées au virus H1N1 en France métropolitaine[modifier | modifier le code]

  •  : 33 morts[9]
  •  : 86 morts. 461 personnes hospitalisées, dont 137 en réanimation ou unités de soins intensifs, entre deux et trois millions de malades (Institut de veille sanitaire, InVS)[10]
  •  : 92 morts. Du 21 au , 993 000 personnes ont consulté pour des symptômes grippaux, soit une augmentation de 40 % par rapport à la semaine du 3 au [11]
  •  : 111 morts
  •  : 118 morts. Deux millions de personnes vaccinés[12]
  •  : 164 morts. 890 personnes sont hospitalisées ; 211 sont en réanimation ou en soins intensifs. Depuis le début du mois d', 5,3 millions de personnes sont infectées et 3,5 millions de personnes sont vaccinées (Institut de veille sanitaire / InVS)[13].
  •  : 276 morts dont 28 chez des personnes sans facteur de risque particulier[14].
  •  : 323 morts[15] (Ministère de la santé)

Affaire des rugbymen[modifier | modifier le code]

En juin 2009, après leur retour d'Argentine où ils ont joué un match, des joueurs de l'équipe de rugby des Barbarians français, dont Grégory Lamboley, sont touchés par le virus[16]. Tous survivent.

Campagne de vaccination[modifier | modifier le code]

Pendant l'été 2009, le gouvernement français opte pour une campagne de vaccination de masse non-obligatoire. Une circulaire est envoyée le aux préfets[17] par les ministres de l’Intérieur et de la Santé. Le plan de vaccination, qu’ils qualifient de « réponse sanitaire évolutive exceptionnelle », débute le . Il y est indiqué que le gouvernement « a commandé des doses de vaccins, afin d'être en mesure de proposer, si cela s'avérait nécessaire, à l'ensemble de la population une couverture vaccinale contre le nouveau virus ». La vaccination se fait sous la forme de deux injections à trois semaines d’intervalle[18]. La campagne de vaccination débute le . Une liste de priorité est diffusée[19], privilégiant d'abord les personnels médicaux (en particulier ceux œuvrant auprès de populations à risque), puis les personnes à risque elles-mêmes, et enfin l'ensemble de la population, à partir du . Le programme de vaccination est mené à la fois dans les hôpitaux et à la fois dans des centres de vaccination établis le plus souvent dans des gymnases et dans lesquels exercent des professionnels de santé réquisitionnés pour l'occasion[20]. Ces mesures de vaccination de masse s'accompagnent d'un dispositif de pharmacovigilance renforcé visant à détecter d'éventuels effets indésirables du vaccin[21].

Le , le gouvernement français décide de faire appel aux médecins militaires afin d'épauler les centres de vaccination[22]. Début , les internes en médecine sont mobilisés. 5 000 personnes sont recrutées « en contrat aidé » par les associations pour apporter leur aide dans les centres de vaccination contre la grippe A/H1N1. Dans les centres de vaccination, les généralistes sont rémunérés 66 euros de l'heure, les médecins retraités 33 euros et les infirmiers libéraux 28,35 euros[23].

Le , le Haut Conseil de la santé publique estime que 5,74 millions de personnes se sont fait vacciner et qu'entre 12 et 18 millions de personnes sont immunisées contre le virus, la majorité l'ayant été par infection[24].

Réticences[modifier | modifier le code]

Des critiques se font entendre. Les médecins généralistes français réclament dès le début de de pouvoir vacciner leurs patients contre la grippe H1N1, ce que refuse le Ministère de la santé[23] qui préfère, outre un argument financier, une meilleure traçabilité de la vaccination dans les centres et une meilleure gestion des vaccins, livrés en flacons de 10 doses.

En France, la campagne de vaccination se heurte à la réticence d'une grande partie de la population, y compris parmi les personnels de santé[25]. Ainsi, le syndicat des infirmières SNPI CFE-CGC estime « qu'une vaccination massive contre un virus grippal relativement bénin présente des risques du fait d’un vaccin développé trop rapidement, et d’un adjuvant susceptible de déclencher des maladies auto-immunes ». Les médecins généralistes, dont une partie se montre aussi méfiante vis-à-vis de ce vaccin, reprochent au gouvernement d'avoir été écartés de cette campagne de vaccination[26],[20].

Selon certains témoignages, les autorités publiques réquisitionnent du personnel « volontaire » qui se retrouve dans des centres de vaccinations sans véritable qualification[27].

En , l'anthropologue Frédéric Keck parle d'« échec global »[28].

Coût global de la campagne[modifier | modifier le code]

Le coût de la campagne est estimé dans un premier temps à 420 millions d'euros. Une somme qui comprend les 48 millions d'euros de dédits déjà donnés aux différents laboratoires. La France possède l'un des dédits les plus importants de tous les pays européens avec 16 % du prix de vente des médicaments. À ces 420 millions d'euros, il convient d'ajouter les 90 millions d'euros environ des factures gérées par le ministère de l'Intérieur, notamment concernant les centres de vaccination[29]. Avec le recul, on bénéficie d'informations plus précises : la Cour des comptes estime que le coût total s'élève à 660 millions d'euros. Cette estimation semble sous-estimée, car elle n'intègre pas certaines dépenses, notamment les indemnisations pour les effets secondaires du vaccin (par exemple narcolepsie)[30].

Le ministère de la Santé annonce que le coût total de la campagne de vaccination 2009 est de 668,35 millions d'euros mais la Cour des comptes l'évalue à 200 millions d'euros de plus. La commission d'enquête parlementaire sur la grippe H1N1 révèle par ailleurs que seules 9 millions de doses non périmées peuvent être utilisées jusqu'en et que 5 924 267 personnes sont vaccinées[31].

Fin de l'épidémie[modifier | modifier le code]

Début , la fin de l'épidémie est officiellement annoncée en France[32]. L'effort de vaccination se met à décroître partout dans le monde[33]. Plusieurs pays (France, Royaume-Uni, Pays-Bas, Qatar, Monaco, Égypte...) annulent une partie de leur commande de vaccins aux laboratoires[34] ou encore aux pays ayant un excédent important de vaccins inutilisés et des responsables politiques sont entendus par des commissions pour répondre aux polémiques que le plan de vaccination suscite. En France, Roselyne Bachelot s'explique devant la Commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale[35] où elle annonce, à l'inverse de ce qu'elle avait déclaré la veille de sa première assignation devant le TGI de Paris[36] (« Il n'y avait pas de clause de résiliation »[37]), que « Plutôt que devoir payer des indemnités sonnantes et trébuchantes à Pasteur-Sanofi, GSK et Novartis, qui pourraient s’élever à plus de 100 millions d’euros, l’État prendrait l’engagement de commander auprès de ces trois firmes ses prochains vaccins, en versant dès aujourd’hui des arrhes pour des livraisons futures. »[38],[39].

Information publique[modifier | modifier le code]

Parmi les éléments de réponse officielle, un site Internet est mis en place, pandemie-grippale.gouv.fr[40]. Il vise à informer la population sur les comportements à adopter vis-à-vis du virus.

De plus, l'Institut de veille sanitaire diffuse régulièrement un bulletin épidémiologique[41].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. L’OMS considère la grippe A (H1N1) comme une pandémie mondiale, Reuters,
  2. Grippe A/H1N1: premier décès en France chez une jeune fille qui souffrait d'une maladie grave - Le Nouvel Observateur, 30 juillet 2009
  3. Un homme de 26 ans meurt de la grippe A à Saint-Étienne - Le Figaro (AFP), 14 septembre 2009
  4. Grippe A: un virus mutant avait tué un jeune Stéphanois "sain" en septembre, Le Progrès, 27 novembre 2009
  5. Deux décès liés à une forme mutante de la grippe A ont été enregistrés en France, RTBF, 27 novembre 2009
  6. Lancement de la campagne de vaccination grippe A/H1N1 dans les établissements de santé
  7. « H1N1 : le ministère de la défense prêt à participer à la campagne de vaccination », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  8. Le Parisien, 13 janvier 2010 : Grippe A : fin de l'épidémie en France
  9. Journal télévisé de 20h, France 2
  10. 86 décès en France depuis le début de l'épidémie de grippe A, lexpress.fr, 30 novembre 2009
  11. Grippe A-France: Bilan à 92 morts, lejdd.fr, 3 décembre 2009
  12. Un nouveau bilan fait état de 118 deces en metropole - nouvelobs.com, 8 décembre 2009
  13. 164 décès liés à la grippe A(H1N1) en France - Reuters, 17 décembre 2009
  14. [1] site de l'INVS
  15. Institut de veille sanitaire : (fr) Bulletin épidémiologique grippe A (H1N1)
  16. « La grippe A pour des Barbarians », sur lequipe.fr, (consulté le )
  17. Planification logistique d'une campagne de vaccination contre le nouveau virus A(H1N1) - Circulaire aux préfets, 21 août 2009 [PDF]
  18. Grippe A (H1N1) : le plan de vaccination du gouvernement français - Le Monde, 27 août 2009
  19. « Liste des personnes invitées à se faire vacciner par ordre de priorité »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?) (consulté le ) - Ministère de la Santé et des Sports, 1er décembre 2009
  20. a et b Davet et Lhomme 2020.
  21. Organisation de la campagne de vaccination contre le nouveau virus A (H1N1) 2009 - Volet Informatif ; Pharmacovigilance - Ministère de la Santé et des Sports, 28 octobre 2009 [PDF]
  22. « Grippe A : l’armée appelée à la rescousse pour vacciner », sur france-info.com, (consulté le )
  23. a et b Grippe A : la polémique enfle entre médecins généralistes écartés de la vaccination et le gouvernement - Le Monde, 30 novembre 2009
  24. « Vaccin contre la grippe A : un enterrement des plus discrets », Rue89, 10 février 2010.
  25. Le vaccin massivement boudé par les personnels de santé - 20 minutes, 6 novembre 2009
  26. Les ratés de la campagne de vaccination anti-H1N1 - Nord éclair,15 novembre 2009
  27. « Réquisitions H1 N1: ça branle dans le manche! » (consulté le ) - Marianne, 10 décembre 2009
  28. Site Cairn Info, article "L'échec global et national de la vaccination H1N1", consulté le 16 avril 2020
  29. Vaccination contre la grippe A(H1N1), coût global de la campagne
  30. Par Le 20 décembre 2013 à 08h06, « La facture de la grippe A s'alourdit », sur leparisien.fr, (consulté le )
  31. Brigitte Rossigneux, Grippette classée "secret-défense", Le Canard enchaîné, mercredi 7 juillet 2010, page 4.
  32. Le Parisien, 13 janvier 2010, Grippe A : fin de l'épidémie en France
  33. Grippe A, l'épidémie est finie - Le JDD, 13 janvier 2010
  34. Ces pays qui commencent à revendre leurs vaccins anti grippe A - Le Monde, 3 janvier 2010
  35. Stocks de vaccins antigrippe A : le gouvernement sur la sellette - Le Monde, 12 janvier 2010
  36. Roselyne Bachelot assignée en référé le 4 janvier 2009 au TGI de Paris - Club Villepin, 5 janvier 2010
  37. Bachelot défend la résiliation des contrats - Le Figaro, 5 janvier 2010
  38. Grippe: Bachelot et les labos proches d'un accord, l'Europe fait marche arrière vis-à-vis du plan de vaccination - Le JDD, 13 janvier 2010
  39. Le gouvernement résilie les commandes de 50 millions de doses de vaccin, les laboratoires grands vainqueurs - Le Monde, 4 janvier 2010
  40. Info' pandémie grippale - Site interministériel traitant des menaces pandémiques grippales
  41. Grippe A(H1N1) - Institut de veille sanitaire

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Liens internes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]