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Covid-19 : la moitié des décès en Europe survenus dans des centres de soins de longue durée (OMS)

Mireille Delon est infirmière à Montpellier, France. Elle prend les précautions nécessaires lorsqu'elle va voir les personnes âgées
Onu France
Mireille Delon est infirmière à Montpellier, France. Elle prend les précautions nécessaires lorsqu'elle va voir les personnes âgées

Covid-19 : la moitié des décès en Europe survenus dans des centres de soins de longue durée (OMS)

Santé

Le chef du bureau européen de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a déclaré que la moitié des décès dus aux coronavirus dans la région ont eu lieu dans des maisons de retraite ou des centres de de soins de longue durée, qualifiant cette situation de « tragédie inimaginable ».

Lors d’un point de presse virtuel ce jeudi à Copenhague (Danemark), le Dr Hans Henri P. Kluge, Directeur du bureau régional de l’OMS en Europe, a déclaré qu’un « tableau très préoccupant » se dessinait quant à l’impact du Covid-19 sur les établissements de soins de longue durée pour personnes âgées, où les soins ont « souvent été négligés ».

« Toutes les personnes qui meurent du coronavirus dans des maisons ont le droit d’être soignées et de recevoir des soins de fin de vie, y compris le soulagement des symptômes avec des médicaments adéquats, entourées de leurs proches », a-t-il ajouté.

Parmi les plus vulnérables, les personnes souffrant d’un handicap physique et/ou mental sont particulièrement vulnérables à ce virus. Leur âge avancé et les conditions de santé sous-jacentes sont autant de facteurs qui les exposent à un risque accru.

De plus, beaucoup ne peuvent recevoir aujourd’hui de visites de leur famille et de leurs amis. Parfois, les résidents vivent sous la menace de mauvais traitements et de négligence. Pour l’OMS, on ne saurait surestimer le rôle du secteur public qui ne laisse personne derrière lui.

« Même parmi les personnes très âgées qui sont fragiles et vivent avec de multiples maladies chroniques - beaucoup ont de bonnes chances de se rétablir si elles sont bien soignées », a insisté le Dr Kluge.

Pour des systèmes de santé donnant la priorité aux besoins des personnes

Dr Kluge a déclaré que les travailleurs de la santé dans ces établissements étaient souvent surchargés de travail et sous-payés et a demandé qu’ils reçoivent plus d’équipements de protection et de soutien, les décrivant comme les « héros méconnus » de la pandémie.

Pour le bureau régional de l’OMS, les soins de longue durée ont souvent été notoirement négligés dans toute la région européenne. « Mais il ne devrait pas en être ainsi », a dit le Dr Kluge.

Pour ce qui est de l’avenir et de la transition vers une nouvelle normalité, l’agence onusienne plaide dans chaque pays pour des investissements dans la mise en place de systèmes de soins de longue durée intégrés et centrés sur la personne.

Par ailleurs, Dr Kluge a demandé une meilleure formation et un meilleur soutien pour les travailleurs de soins de longue durée surchargés et sous-payés, qui, selon lui, ne disposent pas d’un équipement de protection individuelle suffisant pour prévenir la propagation de la maladie.

« Que devons-nous donc faire ? Donner aux travailleurs sociaux les moyens de se prendre en charge. Modifier le mode de fonctionnement des établissements de soins de longue durée. Construire des systèmes qui donnent la priorité aux besoins des personnes », a ajouté le chef du Bureau européen de l’OMS, tout en rappelant qu’il est de notre devoir de ne laisser personne derrière nous.

Des personnes âgées jouant aux échecs.
ONU
Des personnes âgées jouant aux échecs.

 

Près de la moitié des cas de Covid-19 dans le monde - plus de 1,2 million - se trouvent dans la région européenne. « Malheureusement, plus de 113.000 personnes ont perdu la vie », a ajouté le Dr Kluge.

L’Italie, la France et l’Espagne ont connu le pire de l’épidémie, ces trois pays ayant tous trois fait état de plus de 21.000 décès chacun. L’Allemagne a le plus grand nombre de cas de coronavirus de tous les pays européens, mais n’a signalé que 5.094 décès sur plus de 148.000 cas.

En une semaine, les nouveaux cas ont augmenté de plus d’un quart (238.534) et les décès d’un tiers (24.031). Sur les dix pays du monde qui ont signalé le plus grand nombre de nouveaux cas au cours des dernières 24 heures, six se trouvent dans la région européenne. 

« La complaisance pourrait être notre pire ennemi en ce moment »

Selon l’OMS, les pays de la partie orientale de la région (Russie, Turquie, Ukraine, Ouzbékistan et Belarus) ont vu le taux de nouveaux cas augmenter au cours de la semaine dernière. Après Minsk la semaine dernière, les équipes de l’OMS se rendront la semaine prochaine au Tadjikistan et au Turkménistan.

« Ne vous y trompez pas, nous restons dans des eaux très turbulentes et nous le resterons pendant un certain temps », a insisté le Dr Kluge.

Il appelle tous les pays « à garder fermement le cap » sur des stratégies permettant de stopper ce virus, en identifiant, isolant, testant, recherchant des contacts et mettant en quarantaine les contaminés, tout en contrôlant constamment l’efficacité des mesures en place.

Ne vous y trompez pas, nous restons dans des eaux très turbulentes et nous le resterons pendant un certain temps - Dr Hans Henri P. Kluge, Directeur du bureau régional de l’OMS en Europe

Si de façon générale, tout signal indiquant que le virus est contrôlé, géré, atténué est un bon signal, toutefois, la prudence reste le mot d’ordre de l’OMS. « La complaisance pourrait être notre pire ennemi en ce moment. Nous ne pouvons pas nous permettre de croire que nous sommes en sécurité et en sûreté », a affirmé le Dr Kluge.

Pour la branche européenne de l’OMS, toute mesure visant à alléger le confinement doit être soigneusement examinée et entreprise progressivement.

« Le public doit comprendre les risques inhérents alors que les gouvernements, de manière compréhensible, tentent de relâcher la vapeur qui s’accumule dans les sociétés et qui presse nos économies respectives », a ajouté le Dr Kluge.

Plus globalement, l’OMS estime qu’il n’y a pas « de voie rapide vers une nouvelle normalité ». « La question n’est pas de savoir s’il y aura une deuxième vague. La question est de savoir si nous tiendrons compte de la plus grande leçon jusqu’à présent, à savoir travailler entre les vagues pour renforcer la préparation et la poussée pour les pires scénarios », a prévenu le Dr Kluge, qui a ajouté que « tout retour à une nouvelle normalité doit être basé sur une évaluation des risques et se faire progressivement ».