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Mainmise étrangère sur le nucléaire français
Jean-Bernard Lévy (à gauche), avec Li Keqiang, le Premier ministre chinois en 2015.
AFP

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Mainmise étrangère sur le nucléaire français

Souveraineté énergétique

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Pendant longtemps symbole de « l’indépendance énergétique » du pays, le parc nucléaire français est désormais en fâcheuse posture. Et, pour le sauver, la France ne pourra peut-être pas faire sans un partenaire étranger. Le pays de l’atome est aujourd’hui écartelé entre la Russie, la Chine et les États-Unis.

Retour en grâce. Parmi les secteurs qui suscitent les convoitises des grandes puissances, le nucléaire figure en bonne place. En raison de la guerre russo-ukrainienne et de la crise du gaz, cette énergie est sortie du purgatoire où l’avait entraîné l’accident de Fukushima en 2011. Au point qu’une course mondiale s’est de nouveau engagée. Chinois, Russes, Français et Américains (et leurs alliés coréens et japonais) se livrent une lutte internationale sans merci pour remporter de nouveaux marchés.

Dans cette bataille, la France, pays le plus nucléarisé au monde, semble pourtant dépassée, prise au piège. Hier fierté nationale, l’atome est aujourd’hui bien mal en point. L’électricien national, EDF, subit depuis de nombreux mois l’arrêt de près de la moitié de son parc nucléaire pour des raisons de maintenance et de corrosion de certaines pièces en contact avec les réacteurs. Son prototype EPR n’est toujours pas lancé à la centrale de Flamanville. Ces dernières années, les départs à la retraite se sont multipliés, sans que la transmission entre générations ait été assurée. Dans son rapport dévoilé dès l’automne 2019 sur l’échec du chantier de l’EPR de Flamanville, l’ancien patron de PSA, Jean-Martin Folz, déplorait ainsi une « perte de compétence généralisée » et s’inquiétait particulièrement de la « faiblesse des ressources et talents en technique et réalisation de soudage ».

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En l’absence de choix faits à temps par les pouvoirs publics, l’ensemble de la filière est désorganisé. C’est ce qu’avait dénoncé Jean-Bernard Lévy, encore président d’EDF, lors de la dernière université d’été du Medef : « On a beaucoup de chantiers à gérer en parallèle. Résultat, on manque de bras, car on n’a pas assez d’équipes formées. On sait notamment qu’un soudeur ou un tuyauteur, il faut deux ou trois ans pour les former. Et pourquoi on n’a pas assez d’équipes formées ? Parce qu’on nous a dit : “Non, votre parc nucléaire va décliner, préparez-vous à fermer des centrales”. On va avoir besoin de centaines et de centaines de personnes très formées, on en fait venir de l’étranger, notamment des États-Unis, et ça va être difficile. »

EDF plus qu’endetté

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne