Qui protège Salim Laïbi, le « libre-penseur » d'extrême droite ?

Depuis deux ans, une enquête préliminaire est ouverte contre ce chirurgien-dentiste adepte des théories du complot. Sans le moindre résultat.

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Le site complotiste de Salim Laïbi compte plus d'un million de vues par mois. Toutes les plaintes portées contre lui sont jusqu'à ce jour restées sans suite.

Le site complotiste de Salim Laïbi compte plus d'un million de vues par mois. Toutes les plaintes portées contre lui sont jusqu'à ce jour restées sans suite.

© VSC / Science Photo Library

Temps de lecture : 5 min

Son site de fake news compte plus d'un million de vues par mois, Salim Laïbi n'a aucune limite, pas même celles qu'impose la loi. Héraut du complotisme, le chirurgien-dentiste n'a toujours pas été révoqué par son ordre. Celui qui n'hésite jamais à faire état de sa fonction de médecin pour mieux défendre ses idées enchaîne les prises de parole sulfureuses et déverse quotidiennement son lot de théories du complot via les réseaux sociaux. Il fut l'un des tout premiers importateurs français du conspirationnisme en vogue outre-Atlantique depuis les années 2000 et est aussi l'un des plus importants relais du négationnisme médical et antivaccinal.

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Il concentre surtout ses attaques contre les homosexuels, les juifs, les francs-maçons, les musulmans pas assez radicaux à son goût, et pousse ses partisans à la sédition en les incitant à la violence armée « avec des kalachnikovs » contre les institutions républicaines. Il appelle ses troupes à faire tomber la démocratie et la République, qu'il considère comme « judéo-maçonnique ». Dans le viseur de ses calomnies récurrentes et obsessionnelles, la communauté juive, les facultés de médecine, le Crif, la République et la laïcité, la vaccination préventive, le dialogue interreligieux, l'État et les musulmans qui ne partagent pas sa vision radicale de la religion.

Le praticien enchaîne pourtant les polémiques sans jamais être inquiété. Un militant associatif s'est lancé à ses trousses, en vain pour le moment. Omar Djellil, acteur associatif et ancien secrétaire général de la plus vieille mosquée de Marseille, n'a pas hésité à interpeller Xavier Tarabeux, procureur de la République, et l'ancien préfet de police Laurent Nuñez. Celui qui est devenu depuis l'homme fort du renseignement intérieur français en prenant la tête de la DGSI en 2017 avait effectué un signalement (Article 40) au procureur de la République. Son successeur à la préfecture, Olivier de Mazière, a également été alerté. « Je suis effaré que, depuis dix ans, Salim Laïbi jouisse d'une impunité totale quand d'autres praticiens sont sévèrement sanctionnés pour des propos bien plus légers que ceux du médecin marseillais. Je suis surtout accablé par l'absence de réaction du parquet de Marseille qui, lui, ne semble pas prendre à sa juste mesure les agissements d'un médecin qui est désavoué par ses pairs et qui a fait l'objet de plusieurs signalements et de plus de 19 plaintes auprès de l'institution judiciaire et de la police. On est bien loin des beaux discours républicains tenus par nos dirigeants et les représentants de l'État en matière de lutte contre le racisme, la radicalisation et l'antisémitisme », s'indigne Djellil.

Onze plaintes rejetées

Salim Laïbi a trouvé un soutien inespéré de la présidente de la Chambre disciplinaire de première instance de l'ordre national des chirurgiens-dentistes qui, en faisant de la rétention d'informations, a cherché à minimiser ses dérives. La gravité de la situation est telle que le conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes des Bouches-du-Rhône avait désavoué la décision de la présidente en portant plainte contre le dentiste extrémiste. Une plainte rejetée par ladite présidente, comme elle l'avait fait à l'égard de pas moins de dix plaignants.

Certains confrères de Laïbi soulignent le manque de courage de l'Ordre national face à un médecin qui monte des comités de soutien en faveur de négationnistes tels que Robert Faurisson ou Hervé Ryssen et qui réclame la suppression de la loi Gayssot, qu'il considère « scélérate » car elle empêcherait, selon lui, une « relecture de la Shoah ».

Si Soral et Dieudonné sont régulièrement poursuivis devant la justice, Laïbi passe en permanence entre les mailles du filet. Interrogé sur son inaction, le parquet de Marseille n'a pas donné suite à nos multiples sollicitations.

Droit de réponse


À la suite de l'article paru sur le Point.fr intitulé qui-protege-salim-laibi-le-libre-penseur-d-extreme-droite, Mme LORANT, présidente honoraire des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel et présidente de la chambre disciplinaire de première instance de la région Paca Corse de l'ordre des chirurgiens dentistes, réfute toute protection en faveur de M. Laïbi.

« La notion de soutien inespéré et de rétention d'informations impliquerait que j'aurais volontairement protégé M. Laïbi... C'est une totale diffamation, et je ne vois pas pourquoi je protégerais M. Laïbi. Le minimum eût été de se renseigner sur le rôle et la teneur des décisions de la CDPI, éventuellement auprès de moi.

S'agissant des onze plaintes rejetées, l'article dit qu'elles l'ont été pour incompétence de la CDPI à juger des litiges qui relevaient des tribunaux judiciaires [échange d'injures de tous ordres entre les plaignants et le docteur Laïbi]. Je ne vois pas en quoi il y aurait eu rétention d'informations, le litige ne concernait pas la CDPI. Et l'appel d'un des plaignants devant la chambre disciplinaire nationale a d'ailleurs été rejeté pour les mêmes motifs.

S'agissant de la plainte du CDO, le CDO ne s'était pas associé aux plaintes susmentionnées, considérant qu'elles ne relevaient pas de sa compétence, mais avait porté plainte parallèlement, et avant que la décision relative à ces plaintes ne soit connue. Il n'a donc pas porté plainte pour me désavouer mais parce qu'au travers des plaintes susmentionnées, il avait relevé des griefs qui lui semblaient pertinents. La plainte a été jugée non par moi seule mais par la CDPI, qui, outre sa présidente, comprenait cinq assesseurs chirurgiens dentistes et elle a été rejetée pour irrecevabilité au regard des pièces produites, dont tous les assesseurs et moi-même avons pris connaissance dans leur intégralité. Le CDO n'a pas fait appel. »

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Commentaires (23)

  • AM2B

    Salim Laibi, en plus d'être complotiste, est sans aucun doute un musulman ultrarigoriste.
    C'est sans doute pour cela qu'il mène depuis quelques temps une entreprise de démolition très pertinente et fort bien étayée contre Tariq Ramadan.
    Il vient de mettre en ligne une vidéo intitulée "Les masques tombent" qui démoliit avec une grande justesse les arguments de la défense de Mr Ramadan.
    Ça me fait mal de le reconnaître car ce personnage est sulfureux, mais son constat est implacable.

  • René 45

    Mitterand aussi a été mis en place sous Pétain.

  • NAJIA.76

    S’il n’y a pas de résultat, trois hypothèses :

    -il n’y a rien de consistant pour agir ;
    -il y a un vide juridique qu’il faudra combler ;
    -c’est hameçon. En le laissant causer, on fait sortir les loups de la tanière.

    Le risque si la dernière hypothèse perdure, c’est d’influencer d’autres.